Centrale photovoltaïque de Monaco à Levens : Baus Roux menacé (2) - Quand les rochers faisaient 3 morts à Plan du Var
Il y a eu un précédent catastrophique pas loin de Baus Roux, à Plan du Var qui a fait 3 morts, occasionné de nombreux dégâts et fait condamner la commune de Levens déclarée " responsable de la chute des rochers" .
Et comme, pour la centrale photovoltaïque de Monaco à Levens sur le plateau de l'Arpasse, tous les risques ont été minimisés, il est bien d'analyser l'étude hydrologique qui propose un certain nombre d'aménagements soulignant " un impact possible". Quand au risque incendie, le Plan de Prévention des Risques Incendie de la Roquette, situe la zone en risque élevé et très élevé, alors que de son côté le PPRI de Levens bien que prescrit a été abandonné (opportunément?) ... Comme l'avait souligné la commissaire enquêteur: "le point inquiétant de ce projet est sans conteste l’ensemble des risques qu’il fait peser sur les personnes et les biens »
Plan du Var c'est le quartier (de Levens) situé sur la plaine du Var, par la route à 2,9 km de Baus Roux. A vol d'oiseau c'est moins, et ce qui est le plus important c'est de constater que c'est la même chaine rocheuse en surplomb de Baus Roux à Plan du Var, donc les mêmes risques.
La vue aérienne montre bien cela,
(cliquer dessus pour l'agrandir)
30 Mars 1963: 3 morts à plan du Var, suite à la chute de blocs de rochers
Le 30 mars 1963 à 6 h40 du matin suite à un orage et des pluies violentes des blocs de rochers tombent de la falaise depuis une hauteur de 300 mètres. Ils écrasent des maisons et l'école communale et font trois morts, l'institutrice, son mari et un de leurs enfants. Il y a des dégâts matériels énormes.
Rapport BRGM sur la catastrophe ▶http://infoterre.brgm.fr/rapports/63-DS-A035.pdf
Maisons éventrées, canal de la Vésubie brisé, les eaux se déversèrent dans le village et détruisirent un bâtiment de la société d'entreprise de travaux d'Alsace-Lorraine (S.E.TA.L. siège est à Lyon, 14, rue Arnould) où était entreposé du matériel et de l'outillage.
Celle ci assigna la commune de Levens au tribunal administratif, puis en appel à Aix et gagna. La commune de Levens fut déclaré responsable de la chute des rochers de la paroi et du indemniser la société. (Voir l’article du monde qui relate ce fait ▶https://www.lemonde.fr/archives/article/1970/01/19/une-commune-est-declaree-responsable-d-un-eboulement-naturel_2653882_1819218.html )
A noter qu'un épisode semblable en 1925 avait déjà bloqué l'école par une chute de rochers.
La lecture du rapport du BRGM nous renseigne sur les raisons de la chute de blocs, y sont évoquées :
- les conditions climatiques
- La nature de la falaise
- l'eau et le gel
- les racines,
- la température
- Les ébranlements du tonnerre ou d'avions passant le mur du son.
Quand on compare l’analyse de la paroi de Plan du Var ( rapport du BRGM de 1963 page 3) et la géologie de la falaise sous la centrale ( figure 7 de ▶l'étude hydrologique EP permis de construire - 2023) , il ressort quasiment la même composition, à savoir calcaires, calcaires argileux et marnes, puis calcaires dolomitiques (falaise) et marno-calcaire et calcaire grumeleux avec délits schisteux (paroi plan du Var)
De multiples possibilités peuvent entrainer des chutes de blocs.
Elles seraient toutes aggravées par le chantier de la centrale dans un premier temps (coups, vibrations) et par les conséquences de l'implantation de la centrale dans un second temps : moins de végétalisation et l’imperméabilisation induite par les 5 hectares de panneaux, entraineront des incidences sur les écoulements des eaux.
L'interception par la végétation des eaux précipitées va être plus limitée, le ralentissement dynamique des écoulements de surface sera moindre. C’est ce que dit l’étude hydrologique qui a eu pour but de qualifier l’incidence du projet sur les débits de ruissellement.
L’étude hydrologique : « Un impact possible à l’aval »
Elle conclue à « un impact possible par rapport à l’état actuel » Possible, et donc pas nul. C’est pourquoi, elle fait les propositions suivantes pour l’atténuer ( p 25 et suivantes):
- « Des structures de ralentissement de ruissellement, la réalisation de redans en terre issue du site, la réalisation d’un ponceau sur le site, la mise en œuvre d’un piège à embâcle en amont de l’ouvrage, la mise en œuvre d’un dispositif de dissipation de l’énergie en sortie de la section couverte et la réalisation d’une conduite souterraine d’évacuation vers le Var ».
Aucune de ces propositions n’est retenue dans le permis de construire présenté dans le dossier d’enquête publique et aucune n’est demandée dans l’acceptation du permis de construire par la préfecture.
De plus ce qui n'a jamais été étudié c'est l'effet cumulé de chutes d'eau, et de fragilisations du substrat (par exemple lors des travaux pour installer les pieux) et leurs impacts sur cette paroi déjà classée rouge « chute de bloc » au PPRMT de La Roquette sur Var. Pourtant eux aussi sont soulignés:
- Etude hydrologique p17 "les coefficients de ruissellement sont nettement supérieurs à l'état projet en comparaison avec l'état actuel. Un impact sur le débit de ruissellement total en comparaison avec l'état actuel est à prévoir"
Risque incendie minimisé
Cela avait été soulevé lors de l’enquête publique, et par des intervenants, et par la commissaire enquêteur: le risque est sous évalué. Tous les risques, comme on l’a vu plus haut, y compris celui d’incendie
« on ne peut pas écarter totalement le risque de déclenchement d’un incendie » (résumé non technique de l’étude d’impact page 26)
La commune de Levens a été le cadre de nombreux incendies au cours des décennies passées, cela n’apparait nulle part dans les documents présentés. Pour autant aucun plan de prévention des risques incendie (PPRIF) n’a été réalisé sur la commune.
Pire alors que l’étude en avait été prescrite (NDLR= lancée) en 2003, le préfet a annulé cette prescription très récemment (opportunément ?), sans aucune explication convaincante alors qu’avec le réchauffement climatique le risque s’accentue dans toute la zone méditerranéenne.
Des habitations et des corridors écologiques sont à moins de 500 m du site, notamment le quartier de la Môle et de Porte Rouge à Levens et celui de la Fubia à La Roquette sur Var.
A noter que la commune voisine de la Roquette sur Var, avait elle aussi été destinataire d’une prescription de PPRIF en 2003. Mais contrairement à Levens, cette prescription a débouché sur un PPRIF approuvé par arrêté préfectoral le 19 novembre 2015.
Le Mont Arpasse et le site du projet y figurent en risque élevé et très élevé sur la carte de l’aléa PPRIF, et ses alentours en direction des habitations de Baus Roux , de Saint Joseph et de la Fubia ( Porte Rouge) sont tous en risque très élevé. ▶ https://www.alpes-maritimes.gouv.fr/contenu/telechargement/27335/225113/file/CarteAleas.pdf
Or il est connu que les centrales photovoltaïques sont génératrices de risques d’incendie supplémentaires, de part l’électricité présente et la chaleur dégagée par les panneaux. Dans un environnement déjà très sensible, comme celui de l’Arpasse, et qui a déjà subi de nombreux incendies par le passé, cette aggravation peut avoir des conséquences dramatiques.
Les mesures envisagées dans la notice de sécurité établie par la Smeg, en réponse aux préconisations du SDIS ne semblent pas suffisantes pour protéger les habitations et les espaces forestiers environnants.
- ⏩ Conclusion enquête publique permis de construire pages 14 et 15
p14 « l’installation de citernes permettra de lutter contre un incendie déclaré mais elle sera sans incidence sur l’occurrence de survenue d’un incendie sur le site ou à proximité immédiate »
- ⏩Avis Conseil National de Protection de la Nature page 2 « Ce site a subi plusieurs incendies au cours des décennies précédentes ; or cette information cruciale pour la pertinence du site et des mesures ERC n’est pas réellement prise en compte. Cette condition d’octroi n’est donc pas respectée ce qui pénalise ce projet. »
Tous ces éléments alertent sur une sérieuse menace pour Baus Roux,
La Commissaire Enquêteur l’avait souligné « le point inquiétant de ce projet est sans conteste l’ensemble des risques qu’il fait peser sur les personnes et les biens »...« Ces risques majeurs pour la sécurité des habitants ne sont pas pris en compte au dossier d’enquête. Ce qui pourrait être lourd de conséquences : au bas de cette falaise se trouvent entre autre des habitations, une mairie annexe, et une aire de jeux pour enfants » ( p 44▶ conclusions et avis motivé). En voici les illustrations (pages 18 et 19).
Pourtant le permis de construire a été validé tel quel !
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Les procédures judiciaires
Pour récapituler là où nous en sommes, nous avons lancé deux procédures judiciaire auprès du tribunal administratif de Nice.
- Nous avons déposé le 26 mars 2024 un recours en annulation contre la délibération de la Métropole Nice Côte d’Azur qui a fait passer la zone naturelle de l’Arpasse en zone constructible afin d’y construire une centrale photovoltaïque. (délibération n° 10.1 du 25 09 2023)
- Et un deuxième recours en annulation, le 2 mai 2024 contre l’acceptation par le préfet du permis de construire délivré le 01 03 2024 à la société Monégasque de l’ Electricité et du Gaz.
Ici nous tenons à remercier vivement tous ceux qui ont par leurs dons contribué au lancement des procédures judiciaires que nous avons engagées. Sans ces soutiens et ces participations nous n’aurions ni l’envie, ni les moyens de porter ce dossier.
Le financement participatif continue
Pour participer à cette cagnotte collective de soutien, vous trouverez des liens ci-dessous:
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