Festival Alimen'terre à Levens: De la terre qui disparaît...
...à l'assiette qu'on voudrait.
Volonté de créer une ou plusieurs AMAP à Levens, désir d’amplifier l’information, engagement pris auprès de « Terres de liens », les rapports entre l’alimentation et la terre étaient un peu plus forts à l’issue des projections de films et des débats organisés dans le cadre du festival Alimen'terre. Et concrètement il était devenu évident que sans terre il n'y a pas d'agriculture locale.
C’est la contradiction essentielle. Les terres cultivables disparaissent à toute vitesse (3000 hectares par an en PACA) et la demande de produits alimentaires issus d’une agriculture saine de proximité s’accroît à toute allure. Les discours quasi unanimes déplorant cela n’y suffiront pas. Désormais, des actes significatifs sont attendus. Ou sollicités.
C’est dans ce cadre là, qu’à Levens la programmation du festival Alimen'terre proposait films, rencontres, débats (comme ailleurs ), mais s’appuyait aussi sur un cadre très concret: la disparition programmée de terres fertiles, comme à l’Orte.
Que ce soit dans les débats ou les constats, encore une fois la question centrale est bien celle du foncier.
L’AGRICULTURE NE PEUT PAS SE PASSER DES CITOYENS
Lors de cet après- midi il était intéressant de voir et discuter deux facettes de l’alimentation.
- L’une de proximité et « saine », avec le film « Au cœur de la proximité" qui relate l’ expérience d’une AMAP en suisse.
- Et puis une autre alimentation beaucoup plus répandue, l’alimentation industrielle aux USA relatée par le film "Food Inc." . La malbouffe souvent citée mais dont on ignore quasiment tout, de sa conception à ses conséquences désastreuses sur la vie
Ces deux films montrent deux réalités quasiment opposées.
Dans le second, la réalité de la production alimentaire industrielle apparaît dans toute son horreur: le profit comme seul moteur; aucun respect de la planète (saccage des ressources, pollution des sols, des eaux, de l'air); aucun respect de la vie, pas plus celle des animaux que celle des humains, considérés comme simples marchandises. Et malgré tout des résistances qui s'organisent, des consommateurs, des producteurs et des distributeurs qui proposent autre chose, une agriculture pour demain, une agriculture et une alimentation de vie.
Dans le premier, la réalité est à peu près idéale. Les AMAP marchent bien, tout le monde du producteur au consom’acteur à l’air d’être satisfait. Mais cette situation trop belle, peut–être adaptée à la Suisse, n’a que peu de rapport avec la nôtre, particulièrement en région Provence Alpes Côte d’Azur. Car elle ne montre pas ce qui pose problème, à savoir la disponibilité des terres. Comment les obtenir, les transmettre, comment les perenniser face à la spéculation immobilière ...
Lors du débat avec la salle (une centaine de personnes) Henri Derepas, co-porte parole de la Confédération Paysanne 06 a insisté sur cet aspect. « Il faut garder toutes les terres, parce qu’à l’allure actuelle, dans sept ans il n’y a plus d’agriculture paysanne dans les Alpes-Maritimes ».
Et de mettre chacun devant ses responsabilités, les politiques bien sûr, mais pas seulement. « L’agriculture peut se passer des politiques , mais pas des citoyens ». Car chacun peut intervenir lors de la discussion des Plan Locaux d’Urbanisme (c’est le cas à Levens en ce moment) et défendre les « terres fertiles », chacun peut acheter de saison et de proximité etc.
On peut à la fois réclamer le retour des terres de l’Orte à Levens à l’agriculture et demander la construction de 35 logements (et non pas six comme honteusement programmés) aux anciennes gendarmeries. On peut le faire en signant la pétition là…
Car les seuls discours de bonnes intentions ne sont plus de mises devant l’urgence de la situation.
REPAS TYPE D’UN ENFANT :
80 SUBSTANCES CHIMIQUES, 47 CANCÉRIGÉNES
La disparition de l’agriculture de proximité , inéluctable si l’on ne renverse pas la tendance actuelle , va avoir des conséquence pour quasiment tout le monde (excepté quelques privilégiés).
Cela signifiera une production alimentaire de plus en plus éloignée et donc dévoreuse d’énergie et productrice de pollutions.
Cela signifie une autonomie alimentaire précaire (quelques jours à peine).
Cela signifie surtout le risque d’une détérioration de la qualité des produits. Le modèle est connu, celui de vastes exploitations qui développent une agriculture chimique (hors sol) qui n’a que peu de rapport avec la nature.
Et de graves conséquences pour la santé. Ce n’est désormais plus une information confidentielle, mais les repas types recommandés par le ministère de la santé contiennent plus de 80 substances chimiques.
« Plus de quatre-vingts substances chimiques, dont certaines susceptibles d'être cancérigènes, sont ingérées en une seule journée par un enfant de 10 ans à travers ses repas composés suivant les recommandations du ministère de la santé » à la Une du journal "Le Monde".
Information reprise partout, ainsi le journal spécialisé « Développement Durable le Journal »: " 128 résidus chimiques qui représentent 81 substances chimiques différentes", parmi lesquels 47 substances considérées comme cancérigènes et 37 perturbateurs endocriniens. (lien article )
Alors que le nombre de cancers se développe de plus en plus, qu’il touche des enfants en bas âge, les rapports entre l’environnement, la nourriture et la maladie sont pointés du doigt.
Voici le rapport intégral de l’étude qui accuse, de l’étude qui dit ce que nous mangeons (RAPPORT en pdf).
30 PERSONNES S’INSCRIVENT POUR UNE AMAP
Il existe des solutions, mais elles passent toutes par la préservation du foncier. C’est ce que fait « Terre de liens » en se chargeant d’acheter des terres, de les réserver à des agriculteurs et de les retirer de la spéculation.
Une autre façon de s’investir pour sa nourriture c’est de l’acheter à travers une AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne).
A Levens, José Fiorini, référent AMAP, a parlé de son expérience, de ce rapport contractuel, de l’engagement du citoyen au côté du producteur local. Marion Vanderbucke (réseau d'Alliance Provence) a tracé la progression de demandes sur la région. « Il y a des listes d’attentes, tout le monde ne peut être satisfait ». Et c’est le cas sur Levens puisque lors de cette journée, 30 personnes se sont inscrites pour « fonctionner en AMAP ». (vous pouvez les rejoindre, il suffit de nous contacter par mail)
Problème: il manque les terres, ou plutôt non, les terres existent, mais elles ne sont pas affectées à la production de fruits et légumes. L’exemple de Levens est parlant.
L'étude réalisée par le collectif des Terres Fertiles 06 sur l’Orte est sans nuances. « Sur une surface de 6500 m2, un agriculteur peut fournir environ 40 familles par semaine, en panier de légumes diversifié et de saison d’une valeur fixe située entre 15 et 20 euros , et cela sur une saison de 8 mois environ ».
Tous ceux qui ont vu le film « Food Inc » savent combien sont éloignés de la nature les produits (légumes viandes) issus d’une agriculture industrielle, chimique. Il ne nous reste pas beaucoup de temps pour réagir. Après quand les sols seront « artificialisés » comme on dit, il sera trop tard. Seuls quelques très rares privilégiés pourront peut être parfois déguster des mets de qualité, cultivés dans des parcelles "musés", adossés à des restaurants de très grand luxe...
PS:
De nombreuses promesses sont nées de cette journée de sensibilisation. Parmi elles, la demande de la part d’enseignants de poursuivre nos actions d’information.
Nos remerciements à l’équipe du festival Alimen'terre qui nous a fait confiance et en tout premier lieu à Christophe son responsable départemental.
Mille excuses à nos lecteurs pour notre silence ces derniers jours. On le doit à deux virus, l’un vers nos bronches, l’autre vers les ordinateurs (…). Mais tout repart.