Photovoltaïque Alpes Maritimes -II- Les toitures et les friches, suffisantes

Publié le par les perdigones

          Toutes les études ( notamment la revue Nature, L’ADEME, un mémoire du département de l’Ile et Vilaine…) sont affirmatives. Oui, on peut faire autrement que sacrifier les terres pour répondre aux objectifs fixés par l’Etat en matière de photovoltaïque. Toitures, friches, délaissés, sont largement suffisants. Dans les Alpes Maritimes c’est le contraire qui est fait, les décideurs sacrifient les terres et font les études après.

          Actuellement les objectifs de la France concernant le photovoltaïque sont de 100 gigawatts de production d’électricité d’ici à 2050. Pour atteindre ce niveau que faut-il faire?

  • Sacrifier les terres agricoles, naturelles, boisées comme le défendent les grands groupes de l’énergie, le gouvernement et quelques politiques?
  • Ou bien prioriser le choix des toitures, des délaissés, des friches industrielles comme le proclament ceux pour qui la sauvegarde de la biodiversité, des terres est prioritaire?

          Une étude européenne, une étude nationale, une étude départementale évaluent le potentiel en toitures et en délaissés, et il est suffisant.

 

L’ADEME évalue les gisements de PV à 123 GW

sur les grandes toitures industrielles

          Pas d’étude dans les Alpes Maritimes, ce qui permet de faire et dire n’importe quoi, mais des études ailleurs. Ainsi, au niveau national, l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maitrise énergie) évalue « les gisements de PV à 123 GW sur grandes toitures industrielles, à 49 GW sur les friches industrielles et 4 GW pour les parkings ». Beaucoup plus que les 100 GW des plans gouvernementaux.

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télécharger le rapport de l'ADEME

          L’avantage de choisir ces zones là, c’est qu’elles « offrent des surfaces avec peu ou pas de concurrence d’usage ». En gros, elles ne servent à rien d’autre, alors que les sols, comme chacun sait, ont de multiples usages (nourriciers, biodiversité, paysages, gestion des eaux etc.).

          Les chiffres nationaux étant connus, qu’en est-il au niveau départemental ?

 

17 millions de m2 de toitures :

une étude départementale de 2014

          Dés 2014, le département de L’Ile et Vilaine a produit une étude détaillée sur le potentiel de panneaux sur toitures. Cette étude relue et corrigée par la DDTM 35 (Direction Des Territoires et de la Mer) dément tous ceux qui dénigrent cette option.

 Le détail de cette étude de 44 pages est ici . 

La méthode distingue les bâtiments de plus de 1000 m2 au sol, des plus petits.

  • 23 millions de m2 sont ainsi identifiés pour les plus grands bâtiments. Après élimination de nombreuses surfaces (secteurs à enjeux, mauvaise orientation, terrasses etc.) «  37 % de la surface de toitures des bâtiments de plus de 1000 m2 seraient disponibles pour une installation de panneaux solaires soit près de 9 millions de m2 ».

  • Même opération pour les toitures de moins de 1000 m2. Compte tenu des spécificités de ces toitures, seulement 18% de la totalité des surfaces des toitures de ces bâtiments est retenue « Soit près de 8,3millions de m2 ». ​​​​​​​

 Autre étude, mais cette fois à un niveau européen. Le magazine Reporterre cite l’étude européenne de la Revue Nature parue en 2019, et elle aussi confirme le fort gisement en toiture « 24,4 % de la consommation actuelle d’électricité des États membres de l’Union européenne » lit-on. https://reporterre.net/Solaire-la-France-delaisse-les-panneaux-sur-les-toits

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Alpes Maritimes : population sur la Côte, panneaux sur le Moyen et Haut pays.

          Et dans les Alpes Maritimes ? Ce territoire offre 2 caractéristiques : 

  • Une population et une consommation concentrées sur la Côte.
  • Une biodiversité et des paysages remarquables, des espaces naturels et agricoles sur le moyen et le Haut Pays.

          Ces 2 aspects auraient dû inciter fortement les autorités à l’élaboration d’une planification quant à l’implantation du photovoltaïque. Il n’en a rien été et les centrales au sol vont pousser comme des champignons.

          Dans un dossier remarquable d’Aurelie Selvie pour le quotidien Nice Matin (lien ICI) , de nombreux acteurs locaux dénoncent cette gabegie. Un chercheur, Philippe Blanc, directeur de recherche au sein de l’école d’ingénieurs MINES-Paris PSL, basé à Sophia-Antipolis lance un cri d'alarme: « Je suis désemparé par le développement du photovoltaïque dans notre territoire, ça part dans tous les sens". Cet expert en énergie solaire s’inquiète: "Dans le Moyen et Haut Pays, on assiste à un développement de nombreux projets de grandes tailles sur des espaces naturels agricoles ou forestiers sans concertation et sans consistance pour le territoire. Tandis que la dynamique de développement pour le littoral reste bien faible. »

Philippe Blanc, directeur de recherche au sein de l’école d’ingénieurs MINES-Paris PSL, basé à Sophia-Antipolis

Appel à mobilisation, appel à concertation

          Dans une étude (« les enjeux de la transition énergétique solaire dans les Alpes Maritimes ») le professeur Philippe Blanc a calculé les emprises en surface selon les scénarios de consommation électrique à l’horizon de 2050, élaborés par RTE (Réseau de Transport d'Électricité, filiale d'EDF, en charge du réseau public de transport d'électricité en France métropolitaine).

          « Pour une production située entre 14 et 40% de la consommation électrique, selon les scénarios de RTE, le solaire PV produira entre 1.3 et 3.6 TWh

  • 3.6 TWh équivaut à environ 12.6 km2 de modules PV (~ 2.5 GWc)
  • 1.3 TWh équivaut à environ 4.6 km2 de modules PV (~ 910 MWc)  

Traduit en ordre de grandeur, cela représente :  

  • 0.3 % de la surface totale du 06 (429 500 hectares)
  • 4 % du Tissu urbain discontinu (31 140 ha)
  • 54 % des Zones industrielles ou commerciales et installations publiques (2 350 ha)
  • 76 % du Tissu urbain continu (1 660 ha)
  • 3.4 % des zones anthropisées : C'est-à-dire tout à la fois :Tissu urbain discontinu, Zones industrielles ou commerciales et installations publiques, Tissu urbain continu, Equipements sportifs et de loisirs, Aéroports, Réseaux routier et ferroviaire et espaces associés , Zones portuaires, Décharges (37 400 ha) »

          Ces chiffres démontrent que les possibilités autres que l’installation de centrales PV sur les zones naturelles et agricoles ne sont pas une vue de l’esprit, et sont suffisantes pour répondre aux engagements.

          Encore faut-il la possibilité d’une discussion et d’une élaboration entre tous les acteurs des territoires. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. « Il n’y aura pas de débat » telle était l’annonce faite par le maire de Levens à l’ouverture de la réunion publique du 17 Novembre 2022 à propos du projet de centrale photovoltaïque sur le mont Arpasse. 

          Même attitude du côté des services de l'Etat qui ont renié les engagement pris il y a quelques années (voir notre article 2019/04/centrale-photovoltaique-de-levens-de-nombreuses-autorites-contre-ce-projet) . Le non respect du cadrage départemental photovoltaïque a conduit les associations membres des commissions préfectorales CNDPS (Commission Départementale de la Nature, des Paysages et des Sites) et CDPENAF (Commission Départementale de Préservation des Espaces Naturels Agricole et Forestiers) à interpeller le préfet des Alpes Maritimes afin de respecter le cadrage et réunir au plus tôt le comité de suivi des projets photovoltaïques. (leur lettre est ici)

La lettre des associations au Préfet

Cette lettre est restée sans effet. 

          Contrairement à cet état de fait, le professeur Blanc et le paysagiste Joris Masafont (D.P.L.G diplômé de l'École Nationale du Paysage de Versailles-Marseille (ENSP) et également titulaire d'un Master 2 d'urbanisme) lancent un appel à concertation (Ici) qui « doit impérativement réunir au sens large, du littoral aux Moyens et Hauts Pays afin d’aborder les problématiques de solidarités territoriales (sociales, énergétiques, alimentaires). Elle doit concerner les services de l’Etat, de la Région, du Département, des Communautés de Communes. Elle doit aussi réunir les coopératives et les associations de défense de l’environnement, les institutions de recherche, les développeurs de projets photovoltaïques, et plus généralement les citoyens, de tous âges, soucieux et engagés par nos futurs communs. » 

Le cadre régional du photovoltaïque en PACA

            C’est que la défense des terres et de la biodiversité ne relève pas de la lubie de quelques passionnés de la nature. C’est la thèse même du cadre régional du photovoltaïque en PACA (lien ICI). 

          Quand on lit sa présentation, tout y est dit : prix, consommation des espaces, préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, changement climatique, biodiversité, planification, priorité sur les surfaces bâties ou anthropisées…Tout ce qu’avec de nombreux citoyens nous défendons.         

          « Les centrales photovoltaïques au sol, moins chères, pourraient sembler être la principale réponse à ces ambitions. Mais la consommation d’espace qui en résulterait (entre 1 et 2 ha par MW installé) ne saurait se faire au détriment de la préservation des espaces agricoles, naturels et forestiers, qui contribuent par ailleurs au stockage du carbone, à l’adaptation au changement climatique et au maintien de la biodiversité. Leur développement est donc conditionné à une réflexion territoriale et doit pouvoir s’inscrire dans une planification choisie et anticipée par les collectivités. Pour ces raisons, le développement de l’énergie photovoltaïque doit s’effectuer prioritairement sur les surfaces bâties ou anthropisées, dont le potentiel estimé en France (350 GW selon une étude de l’ADEME) permettrait d’atteindre en grande partie voire en totalité les objectifs fixés dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) et dans les schémas régionaux.» 

          Moins cher: les centrales au sol ? Pas en prenant en compte tous les paramètres, comme la valeur de la nature, des terres, de la biodiversité et des immenses services qu’ils rendent à la vie.

          C’est ce que nous verrons dans notre prochain article : « III - La biodiversité compte pour rien »

 

NOTE
La communication officielle a été massive pour vanter les mérites de la construction de cette centrale photovoltaïque qui va transformer 20 hectares d'espace naturel en surface constructible, mais des problématiques et informations qui permettent de se faire un avis éclairé ont été soigneusement évitées.
Ainsi dans cette nouvelle série de 3 articles , nous allons traiter de ces questions:
I - De l'électricité pour Monaco ( et pas pour Levens) -  (http://lesperdigones.fr/2023/01/photovoltaique-a-levens-06-de-l-electricite-pour-monaco.html)
II - Les toitures et les friches suffisantes (Des études montrent que les objectifs sont largement  atteints ainsi) (ci-dessus)
III - La biodiversité  compte pour rien (Même pas prise en compte pour le choix des sites, seule compte la rentabilité immédiate) (à venir)

 

Publié dans photovoltaïque, Urbanisme

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B
Etude fouillée, excellente, comme toujours. Merci
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