Les Alpes-Maritimes et le Var champions de la construction en zone inondable
Entre 1999 et 2006 il s’est construit plus de 9000 logements en zone inondable dans les Alpes Maritimes. Un record qui en fait, avec le Var, le champion de France de cette spécialité.
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Le département des Alpes Maritimes est celui qui a le plus construit en zone inondable de 1999 à 2006. C’est ce qui ressort d'une étude du ministère de l'écologie, du Développement Durable, des Transporte et du Logement .
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Cette étude: "le point sur la croissance du nombre de logements en zone inondable" , téléchargeable ICI chiffre cette « fantaisie » à plus de 9000 logements construits en zone inondable dans les AM.
Avec un peu plus de 8000 logements, le Var voisin vient juste derrière.
Ces départements, plus le Val de Marne, « se caractérisaient déjà par de nombreux logements exposés en 1999. Cette dynamique s’est ainsi poursuivie à un rythme moyen de 5 à 8 % sur sept ans». Elle a continué et aggravé la tendance.
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En sept ans, 100 000 logements supplémentaires en zone inondable
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Au niveau national, le non respect des réglementations concerne selon cette étude du ministère, près de cent mille logements. Et pourtant l’étude est à minima puisqu’elle ne prend en compte que 424 grandes communes de plus de 10 000 habitants exposées à un risque majeur d’inondation.
En 1999 « 2,7 millions de personnes résidaient dans ces secteurs et 1,45 million de logements y étaient localisés ». L’augmentation « représente une hausse de 7% ».
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Cela est considérable, d’autant qu’entre temps les PPRI (Plan de Prévention des Risques Inondations ) se sont multipliés. Là où ils ont été approuvés, ils ont réduit la tendance, mais ne l’ont pas supprimée (0,4% d’augmentation de construction contre 1,3%), preuve qu'ils sont faits à minima ou appliqués de façon "légère"
Voir notre article : "Inondations : la prévention pas à la hauteur"
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Cela est considérable aussi parce qu’entre temps « quatre événements dommageables ont été recensés entre 1999 et 2006. Par exemple une centaine de maisons ont été détruites lors des inondations catastrophiques dans le Gard en septembre 2002 ». Rappelons que cet épisode à coûté la vie à 23 personnes et qu’il a été évalué à 1,2 milliards d’euros de dégâts (Gard et département limitrophe). Autre exemple en 2003 , c’est le Centre Est et le Sud Est de la France qui ont été touchés. Les inondations ont provoqués 7 morts et occasionné 1,5 milliard d’euros de dommages économiques.
Mais tout s’oublie vite et malgré tout ça, on continue à bâtir là où il ne faut pas.
Il y a un an dans le Var, la faute à la nature?
Autre exemple plus proche de nous, les inondations du Var.
Il y a un an, la région de Draguignan était frappée par de fortes pluies. Bilan 25 morts plus d'un milliard d'euros de dégâts. La responsabilité, à la nature ? Certes mais pas seulement, voir notre article: "Inondations dans le Var : « On n'avait jamais vu ça ? »
Il est admis qu'imperméabilisation des sols, bétonisation, non respect des leçons du passé, conjugués à des événements qui seront de plus en plus violents, ne peuvent qu'engendrer des catastrophes.
Il faut préciser ce qu'on entend par fortes pluies. (voir aussi l'article du site "notre planète info"). Nous reproduisons la carte de météo France de cet événement .
Entre 300 et 400 mm d'eau se sont abattus sur les lieux en 12 heures. Ce qui est beaucoup, mais à comparer avec quelques autres épisodes. En 10 heures il est tombé 950 mm d'eau à Valleraugue (le record relevé), la catastrophe de Nîmes c'est entre 300 et 400 mm (selon les lieux) en huit heures, Lézignan 650 mm...
À chaque fois il est prévu que les nuages chargés d'eau avançent, traversent les régions. ( Draguignan était seulement en alerte orange). Et puis parfois des phénomènes de masses d'air venant de la mer se combinent à d'autres venant de la montagne et bloquent les nuages sur un lieu. Cela s'est produit à Nimes , dans l'Aude... Cela se reproduira dans tout le Sud .
Mais tout s’oublie vite et malgré tout ça, on continue à bâtir là où il ne faut pas.
C’est vous qui payez…
Ce qui ne s’oublie pas c’est le coût pour la collectivité.
On entend parfois la réflexion, « après tout ça les regarde, s’ils ont envie de vivre là c’est leur problème ».
Pas si simple.
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D’abord il y a une partie de ces population qui ne connaît pas le risque réel. Avant il n'y avait ni PPRI, ni PLU, ni POS.
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Et puis il y a ceux qui abusent et minimisent les risques, qui décident malgré tout de rendre constructible ces terrains.
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Ensuite il y a des gens qui n’ont pas le choix et occupent les appartements ou maisons qu’on leur propose. Bien sûr ce ne sont pas les plus riches. Eux ont habitations, propriétés dans des lieux « bénis des dieux » comme on dit.
Et puis ce n’est pas vrai, ce n’est pas que leur problème, c’est aussi le notre. À tous.
Car que se passe t-il lorsqu’il y a une catastrophe ?
L'état, les collectivités interviennent, dépensent beaucoup, mais avec quel argent? si ce n'est celui des impôts.
Les assurances remboursent aussi pour une part. Mais les assurances ne sont pas des philanthropes. Ce qu’elles donnent d’une main, elles l’ont récupéré d’une autre. Comment ? en augmentant les cotisations de tous les assurés. C’est ce qui s’est produit suite à Xynthia et aux inondations que le Var a subi.
Voici un exemple de courrier que les assurés ont reçu.
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« Tempête Xynthia, inondations catastrophiques du Var…..Nous impose de revoir certains tarifs et certaines franchises. L’habitation est la plus touchée en raison des événements naturels qui n’ont cessé de s’enchaîner. »
Et puis il y a la vie, ces vies arrachées, ces proches à jamais blessés, et cela n'a pas de prix.
Mais tout s’oublie vite et malgré tout ça, on continue à bâtir là où il ne faut pas.
L’Orte à Levens (06), l'eau n'existait pas
L'Orte est un exemple qui en dit long. La gestion de ce dossier est exemplaire quand à la performance du département des Alpes Maritimes pour les constructions en zone inondable. Car si la période étudiée date de quelques années, certains (pas tous heureusement) veulent perpétuer ces pratiques.
Petit rappel : L’Orte est un lieu-dit des Alpes Maritimes de tout temps dédié à la culture de légumes. Son nom signe son identité: l’Ouort, l’Ortaria, l'Orto, voulant dire potager. Pourquoi là à 3 km du village ? Parce qu’il y a de l’eau !
De l’eau qui lors d’épisodes très pluvieux, tous les 10 ou 15 ans, coule trop et de partout. Il en sort des ruisseaux, de la montagne du dessus, en résurgence de dessous la terre, déclenche des sources intermittentes…Quelques photos prise lors d'événements (pas les plus graves) et publiées sur ce blog sont parlantes. C'est précisemment ce triple phénomène: ruissellement, crue des cours d'eau et rivières souterraines qui a été mis en évidence dans la région de Draguignan.
L’ampleur de ce qui s'est déjà passé à l'Orte, ainsi que quelques caractéristiques du lieu ont été décrites par la présidente des Perdigones lors de l’enquête publique du PPRI début 2009. Le commissaire enquêteur ainsi que les services de l’État ont demandé des études complémentaires sur le lieux.
C’est pourtant sur cette zone vierge de toute construction (2,5 hectares ) que la Communauté Urbaine de Nice Côte d’Azur a décidé fin 2009 de modifier le coefficient de construction afin d’y bâtir des immeubles. Manque de logements ? Mais nous l'avons dit, ils pourraient être réalisés en lieu et place des locaux et appartements des deux gendarmeries abandonnées depuis longtemps (lire" L’Orte (Levens 06) : Permis suspendu, étude en cours, Persévérance coupable" )
Dans un premier temps, à l'Orte, un projet de 4 immeubles et de 35 logement (2200 m2 de surface habitable) est prévu sur une surface de 6500 m2. En effet le lieu a été préempté par le maire de Levens ( Antoine Véran, UMP) à cet effet. Aujourd’hui ces terres, pour 600 000 euros, (un cadeau empoisonné) sont en la possession de l’Etablissement Public Foncier Régional l’EPFR PACA.
Le permis de construire qui a été déposé a été déclaré « sans suite » par les services de l’État. Le constructeur a du missionner un hydro-géologue pour faire une étude sur l’eau dans le secteur.
Cette étude a été faite et rendue aux commanditaires. Le maire de Levens s’est vanté en séance du conseil communautaire le 21 janvier 2010 d’y "travailler". Dans le plus grand des secrets et surtout sans associer l'association qui a révélé la réalité du secteur !
À la communauté urbaine (NCA), cette étude a été demandée par Rémy Gaechter(élu communautaire) à Alain Philips (en charge des questions d'urbanisme). Mais cette étude est tenue secrète.
Et qu’en pense L’EPFR PACA ?
Il y a eu tellement de mensonges sur ce lieu, sur ce dossier, que la moindre des choses serait que tout se fasse au grand jour.
Ce n'est pas ce qui a été choisi par le maire de Levens. On se doute pourquoi.
Vous voulez quelques exemples du niveau auquel est géré ce dossier ? Il suffit de reprendre les déclarations du premier magistrat de la commune .
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"Il n'est pas tombé plus d'eau à l'Orte que sur le reste de la commune" (lors de l'enquête publique du PPRI).
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« ces photos sont anciennes, et puis depuis les problèmes sont réglés, il y a le vallon qui est parfaitement calibré pour recevoir les eaux » (4 décembre 2009 à la communauté urbaine NCA).
On pourrait continuer longtemps...
Il paraît évident que l'on a affaire à un "déni de la réalité"
Mais tout s’oublie vite et malgré tout ça, on continue à bâtir là où il ne faut pas.
Les élus inquiétés ?
"La moindre des choses serait que tout se fasse au grand jour."
Au grand jour, sans rien cacher, ni des risques, ni des surcoûts. Sans omettre toutes les hypothèses de la meilleure utilisation (par exemple maraîchère) d’une des deux dernières terres arables de la commune.
Au grand jour car lorsque les problèmes arrivent ce n’est pas toujours « la faute à pas de chance », « la faute à la nature ».
Et les choses commencent à changer. Ainsi suite à la catastrophe survenue à la Faute sur Mer et ses environs, une plainte a été déposée par L’AVIF (Association des Victimes de la Faute sur Mer et de ses environs)
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Et l’information tombait le 14 Avril 2011 « René Marratier, le maire de La Faute-sur-Mer, vient d’être mis en examen, vient-on d’apprendre aux Sables-d’Olonne, pour «homicide involontaire» et «mise en danger de la vie d’autrui». Le juge d’instruction n’a pas retenu la «prise illégale d’intérêt». (AFP)
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Auparavant un autre élu était placé en garde à vue « Patrick Maslin, maire adjoint membre de la commission urbanisme de la commune mais aussi responsable d'une entreprise de construction immobilière, a été entendu par les enquêteurs de la section de recherche de la gendarmerie d'Angers et la brigade de recherche des Sables-d'Olonne jeudi." ( Le Monde, 8 avril 2011 "un élu de la Faute sur mer en garde à vue, plus d'un an après le passage de Xynthia")
Bien sûr, aucune situation n’est comparable. Et construire en dessous du niveau de la mer n’est pas la même chose que construire en des lieux où l'eau fait des caprices lors d' épisodes méditérannéens parfois extrêmes.
Mais à Levens comme en de nombreux autres endroits où ceux qui connaissent les lieux (les anciens, les riverains, les associations, ...) ont alerté... produit des documents... il sera vraiment difficile de dire « on ne savait pas »
voir aussi notre billet