Suite à l’enquête publique devant mettre en conformité le plan local d’urbanisme métropolitain avec le projet d’un parc photovoltaïque à Levens, le commissaire enquêteur a rendu un avis favorable avec une réserve et deux recommandations. Mais ce rapport est un peu comme à la Samaritaine, on y trouve de tout, même des réponses aux objections du public à partir de documents non présentés à l’enquête publique (étude d’impact par exemple). A noter le peu de commentaires critiques du commissaire enquêteur lorsque la Métropole répond superficiellement aux objections des opposants.
On trouve de tout dans ce rapport : De tout et son contraire.
Voici, sur le site de la Métropole, l'ensemble des documents composant le rapport du commissaire enquêteur, lien ➡ https://ep-photovoltaique-levens.nicecotedazur.org/?page=rapport
Des remarques évidentes et que chacun peut vérifier. Exemples :
Mieux même :
Un « atout »dont le public se passera…
Des affirmations non démontrées
Mais on trouve aussi des affirmations totalement gratuites et non démontrées comme cet exemple:
A l’appui de cette affirmation du commissaire enquêteur sur un point central du débat, aucun argument, aucune étude n’est fournie puisque la métropole n’a rien fait, rien étudié, à la différence d’autres départements ou régions de France. Et là où les études ont été faites, démonstration est faite justement que toitures et sites anthropisés peuvent suffirent. (voir notre article ▶ http://lesperdigones.fr/photovoltaique-alpes-maritimes-ll-les-toitures-et-les-friches-suffisantes)
Quid des travaux du chercheur Philippe Blanc que de nombreuses personnes ont cité dans leurs contributions ? Aucune analyse du commissaire enquêteur à ce propos alors que ce chercheur a fait justement une étude (lien➡ les enjeux de la transition énergétique solaire dans les alpes maritimes) indiquant que les toitures des zones industrielles et commerciales et des zones anthropisées du département seraient largement suffisantes (3,4% suffiraient - voir page 11 de l'étude) . C’est peut être un peu plus compliqué et plus cher à court terme de faire ainsi, mais à l’heure de la disparition des insectes et de l’impérieuse nécessité de préserver la biodiversité, quand on peut faire autrement que de sacrifier des espaces naturels il n’y pas à hésiter.
Mais là encore de qui se moque t-on? Combien cette centrale doit-elle produire? Et de combien est la consommation sur la zone PACA Est (Nice Cannes) censée bénéficier de cet apport? Même pas 1%.
Le commissaire enquêteur affirme (en cœur avec les porteurs du projet, et le maitre d’ouvrage) que le projet est réduit… alors qu’il y a toujours 20 hectares d’impactés (même si la totalité des panneaux ne porte que sur 5 ha).
Alors même qu’il est dit par ailleurs qu’un dossier de demande de dérogation (destruction NDLR) aux espèces protégées sera présenté devant le conseil national de protection de la Nature (p74-Rapport). Pas de réaction du commissaire enquêteur…
L’autorité environnementale s’était montrée moins laxiste sur ces questions importantes et avait émis de fortes critiques …
Voilà juste quelques points où il n’y a pas d’analyse critique, pas de réponses satisfaisantes, voire pas de réponse du tout aux objections avancées par les opposants.
Alors oui le rapport reconnait que ce projet soulève majoritairement l’opposition des participants mais à la lecture de la méthode et des réponses de la Métropole il est fort à parier que les craintes et les désaccords persisteront.
Une forte opposition, argumentée
L’enquête publique a donné lieu à une forte participation (contrairement à la phase dite de « concertation » où le seul discours en vigueur était celui des porteurs du projet).
Selon le commissaire enquêteur, la forte participation se décompose ainsi « 323 contributions ou observations auront été enregistrées, 149 portant un avis favorable, 172 portant un avis défavorable. » (p46-Rapport)
Ces chiffres bruts sont à affiner. Sept associations, dont certaines ayant un agrément Régional (FARE SUD) ou National (LPO) ont participé et toutes ont porté un avis défavorable très argumenté.
Dans ses décomptes le commissaire enquêteur compte chaque association pour 1 personne alors que celles-ci comptent à minima plusieurs dizaines d’adhérents. A noter que les élus du groupe écologiste de la Métropole, ainsi que l’élue au parlement européen Mme Caroline Roose, qu’on ne peut taxer d’opposants aux énergies renouvelables, se sont prononcées contre ce projet faisant valoir d’autres alternatives et le respect des zones naturelles et des espèces implantées.
Donc tout le monde compte pour un… Le commissaire enquêteur relève que ceux qui se sont prononcés pour ce projet « ont émis des observations peu ou pas argumentées, validant ainsi le projet et son intérêt général dans son ensemble » (p 50-Rapport). Peu ou pas argumentés, c’est le moins que l’on puisse dire, de ces remarquables « je suis pour ce projet », alors que face à eux, des particuliers, des associations ont travaillé la question et donnent des pages d’argumentaires.
Et cela devrait peser de la même façon ? Pourtant une enquête publique se doit de ne pas être un vote mais un lieu d’argumentation auquel le commissaire enquêteur se doit de répondre…
« Le projet ne sera d’intérêt général que si… »
Cette phrase est le début de la réserve (p35) énoncée par le commissaire enquêteur après avoir donné un avis favorable à la « mise en compatibilité du PLUM ». Elle est étonnante. « Que les mesures ERC sont concrètement exécutées par le porteur du projet ». En gros on demande au porteur du projet (la Métropole) de faire ce qu’il annonce. Et alors même si ce qu’il annonce est fortement critiqué par l’autorité environnementale… Et même s’il y a bien quelques modifications et quelques compléments d’information que l’on découvre dans des documents non fournis à l’enquête publique (un point pour le moins douteux) le compte n’y est pas et loin de là.
Pour le commissaire enquêteur, donc, que la Métropole fasse ce que la majorité des participants à l’enquête a rejeté et tout ira bien. Pourtant ce n’est pas l’annonce d’un comité de suivi (qui suivra ce qui est critiqué…), ni l’annonce de déménagements d’espèces à Châteauneuf -Villevieille et en un autre espace de l’Arpasse, (les fameuses compensations) qui sauveront le site, et les espèces qui le fréquentent. Pas plus que ce projet ne participera efficacement à l’approvisionnement énergétique de la Métropole, contrairement à ce qui est avancé.
Il en est ainsi de nombre d’explications, justifications, avancées par la Métropole, sans qu’elles ne soient toutes discutées par le CE alors que de très nombreuses contributions amenaient des contre-arguments, débusquaient des approximations, des erreurs.
Le choix qui est fait à Levens profite d’un contexte national favorable, mais ne résoudra en rien les problèmes énergétiques et participera à la dégradation des espaces naturels.
La suite annoncée devrait se passer ainsi: une délibération de la Métropole pour modifier (ou non) le PLU pour permettre ensuite le dépôt du permis de construire. Permis de construire dont on apprend déjà dans le rapport du commissaire enquêteur qu’il « est conforme » (sic). Cela s’appelle mettre la charrue avant les bœufs…Permis de construire qui devra donner lieu à une autre enquête publique et à une nouvelle délibération de la Métropole.
Et bien sûr, les recours éventuels au tribunal si le projet est maintenu …
*Un conseil de lecture 📖: « Terre silencieuse Empêcher l’extinction des insectes » de Dave Goulson (Sans insectes, pas de vie possible )