LE P.L.U DE LEVENS EN APPEL A MARSEILLE (II)
Le PLU de Levens sera examiné prochainement par la Cour d'Appel Administrative de Marseille suite au recours formulé par des habitants, et les associations « Les Perdigones » et FARE SUD qui pointent de nombreuses « illégalités » ou « erreurs manifestes d'appréciation »
2eme partie : De nombreux points soulevés
Depuis que la procédure d'appel a été lancée en 2015, de nombreux mémoires ont été produits, tant par la métropole que par les associations. Le tribunal vient de clore les débats écrits et une date d'audience devrait être annoncée prochainement.
En droit administratif, ce qui est le plus souvent invoqué est l'erreur manifeste d'appréciation. Selon la définition du commissaire du gouvernement Braibant (sous CE, 1970, Lambert), l'erreur manifeste d'appréciation est une « erreur évidente, invoquée par les parties, reconnue par le juge et qui ne fait aucun doute pour un esprit éclairé ».
C'est dans ce cadre là qu'ont été évoquées, ce qui aux yeux des requérants apparaît comme des irrégularités.
LES GRANDS PRES PROTEGES MAIS ROGNES,
LA COLLINE PROTEGEE MAIS CONSTRUCTIBLE
Sur les 70 pages du dernier mémoire produit par les habitants et les 2 associations relevons quelques points.
- Bien sûr il vient immédiatement à l'esprit que la zone de mixité sociale de l'Orte ne peux plus exister puisque le PPRI (plan de prévention des risques inondations), s'imposant en droit au PLU, doit désormais classer la totalité de la zone en rouge inondable inconstructible. Une erreur manifeste d'appréciation du document qui devra être corrigée de toute façon, suite cette décision de justice survenue en avril 2016 et confirmée par la Cour de Cassation en décembre 2017.
- L'Orte a cumulé les aberrations. Ainsi on peut y évoquer aussi l'absence d’évaluation environnementale. Absence d'évaluation qui aboutit à positionner un couloir écologique sur sa partie dégradée, le couloir écologique passant même par une habitation, alors que la partie riche en biodiversité comportant même une espèce protégée par la convention de Berne était choisie pour constructible.
- On peut aussi évoquer la DTA (Directive Territoriale d'Aménagement) qui classe ce secteur en discontinuité d'urbanisation.
- Au delà de ce secteur beaucoup d'autres questions sont soulevées sur l'ensemble de la commune, comme la question de la légalité de l'enquête publique. Pendant son déroulement le conseil municipal (légalement le PLU dépend de la Métropole) avait décidé unilatéralement de plusieurs modifications. Sont-elles de nature à changer l'économie générale du projet, ce qui est interdit ? Sont-elles de nature à avoir induit les habitants en erreur et pesé sur leurs interventions pendant l'enquête ? Au tribunal de juger.
- Et puis il y a des affirmations qui sont de nature à soulever l'erreur manifeste d'appréciation. Par exemple la protection d’un bosquet boisé très pentu, sur le secteur de la colline est proposée par le commissaire enquêteur qui cependant demande à maintenir la zone en..... zone constructible: incohérent...proposition acceptée bien sûr par la métropole...
- Contrairement à ce qui est affirmé par le commissaire enquêteur, qui demande qu'elles soient toutes classées ainsi, il n'existe pas pour les oliveraies de zone Ao « Agricole Oliveraie »: incompréhensible...
- Alors que le secteur des Grands Prés est protégé, et que personne n'a demandé une quelconque modification, le plan de zonage adopté procède à une réduction de la zone protégée, au niveau de la voirie centrale. Cette modification est illégale selon les requérants.
- D'autres modifications de zonage, secteur de la Madone des Prés, ont été effectuées sans qu'elles ne résultent de l'enquête publique,...
DES ZONAGES INJUSTIFIES
Par ailleurs les requérants jugent l'évaluation environnementale insuffisante et les zonages non justifiés ou incohérents.
- Par exemple : à quoi correspondent les différents classements des zones d'oliviers ? Certains sont en zone agricole, d'autres en zone Naturelle Oliveraie, d'autres en zone constructible, d'autres en zone naturelle. Et ce n'est pas le fait qu'elles soient cultivées par des professionnels ou non qui justifie cette différence comme tente de l'expliquer la Métropole. Exemple a été fourni de professionnels qui n'ont pas été classés en zone agricole.
Alors sur quels critères les choix ont-ils été faits ? Mystère....
- D'autres points importants sont soulevées comme la non justification de la zone d'attente (quartier La Madone); l'arrangement pour rendre constructible un terrain en décroché dans une zone naturelle, chemin de l’Ordalena; le droit à construire exorbitant en zone agricole de 1000 m2 au sol, jusqu’à 13 m de hauteur, soi- disant en référence aux dimensions de la ferme de Porte Rouge alors que celle ci ne fait pas la moitié, tant en surface qu'en hauteur.
- Zonage agricole de zones naturelles sans intérêt agricole, qui permet en réalité d'ouvrir la partie basse du Férion, composée de garrigues et de chênaies, à l'urbanisation.
- Zonage agricole assez bizarre encore puis que sont sacrifiées à la construction la majeure partie des quelques 15 ha de terres arables restantes de la commune, et classées abusivement en agricole les vastes zones naturelles de garrigues et de cailloux, parcourues par les moutons.
Ces choix ne devraient plus être possibles aujourd'hui car il a été décidé de mettre fin à cette imposture, avec obligation au préalable de réaliser une étude de la valeur agronomique des terrains susceptibles d'être ouverts au zonage agricole.
LA GESTION DES EAUX PLUVIALES, INDIGENTE
Les requérants soutiennent que le système de gestion des eaux pluviales est insuffisant voire quasi inexistant.
Et pourtant le rapport de présentation du PLU ( p 133) indique « une topographie accidentée.... pas d'assainissement pluvial dans le vieux village, des réseaux d'eaux pluviales associés à des vallons sur certains lotissements (Laval , Saint Roch) , des points noirs recensés concernant les quartiers de Laval, Saint Roch, Fuon de Mel...
Afin de sembler présenter une vision et proposer des réponses au problème, ce même rapport de présentation publie une carte (p132) (lien basse définition) présentée comme « le plan de zonage d'assainissement pluvial de Levens »
Sauf que cette carte est en réalité celle … correspondant au réseau du traitement des eaux usées (lien haute définition)... On ne la retrouvera avec son libellé exact, que dans les annexes. Ce réseau est effectivement assez étendu mais il n'a rien à voir avec celui des eaux pluviales ( il est d'ailleurs formellement interdit de rejeter les eaux pluviales dans les égouts)
Quant à la vraie carte correspondant au réseau indigent des eaux pluviales de la commune, (lien haute définition) elle est bien différente, mais elle se trouve seulement dans les annexes, sans que rien dans le rapport de présentation ne l'indique.
Comment dés lors, en présentant une carte fausse qui minimise le problème, élaborer un PLU au plus près de la réalité et cela pour un domaine jugé comme fondamental dans toute politique d'urbanisation.
Car lorsqu'on regarde la carte du réseau d'eaux pluviales, on s'aperçoit que de réseau, il n'y en a quasiment pas, avec comme grave conséquence, la quasi impossibilité de les évacuer ou de les récupérer.
Quant à l'un des rares réseaux existant qui longe le Grand Pré, il rejette les eaux dans le ruisseau qui borde la route M19. Or ce ruisseau classé en rouge au PPRI, ne peux pas recevoir des eaux supplémentaires sans aggraver le risque inondation.
Cette grave insuffisance dans la gestion des eaux pluviales est-elle de nature à annuler le PLU ?
D'autres points sont relevés comme la non concertation d'association agréées (pourtant obligatoire) en amont de la décision, le non respect du contradictoire en première instance (impossibilité de répondre à un argumentaire de la Métropole qui n'a pas été fourni aux requérants ) etc.
Les habitants et les associations ont pointé ce qui leur semble plus que problématique, voire illégal, à la justice de trancher...